« Silence et tais-toi ! Si personne n’écoute, ne parle pas ! Silence et tais-toi, le monde ne tourne pas qu’autour de toi ! », ces mots de l’héroïne du mini documentaire, intitulé « Break the silence », produit par la réalisatrice burundaise Aziza JAFFER, résument le drame de beaucoup de jeunes pris dans l’engrenage de la dépression et qui manquent de soutien pour s’en sortir. Ce film-fiction a été projeté au cours de l’atelier national sur la santé mentale qui a eu lieu le 24 Octobre 2022 à Gitega, sous le haut patronage de la Première Dame du Burundi, SE Angéline NDAYISHIMIYE, pour montrer comment un état dépressif peut conduire à une maladie mentale si la victime ne reçoit pas de soutien pour guérir. Le documentaire visait aussi, selon son auteure, à sensibiliser sur les dangers de la stigmatisation et la nécessité de venir en aide à toute personne sujette à une maladie mentale. 
« Break the silence » a servi de tremplin pour les travaux de cet atelier organisé par le Ministère de la Santé Publique et de la Lutte contre le Sida, dans le cadre de l’édition 2022 de la Journée mondiale de la santé mentale, avec l’appui technique de l’OMS et d’autres partenaires au développement comme l’Union Européenne, Caritas Burundi, Enabel, Louvain Coopération, Memisa et la Coopération Suisse. 

Placé sous le thème « Faire de la santé mentale et du bien-être de tous une priorité au Burundi », cet atelier a permis d’échanger sur les progrès réalisés dans le domaine de la santé mentale au Burundi, de partager les leçons apprises, de soulever les défis à relever et de faire des recommandations pour l’amélioration de la collaboration intersectorielle et des interventions en santé mentale. Pour ce faire, quatre (04) exposés ont été présentés par des experts burundais et internationaux sur les thématiques suivantes :

1-Introduction à la santé mentale : Axé sur l’importance de la santé mentale dans la vie des individus et des groupes, cette thématique a mis en exergue les enjeux actuels ainsi que les gaps existant dans la prise en charge des personnes présentant des troubles mentaux notamment dans les pays en développement.

2-L’intégration des soins de santé mentale dans les systèmes de santé : Cet exposé a mis en lumière les résultats du programme Ni Abacu (ils sont les nôtres en langue Kirundi) financé par la Coopération Suisse qui œuvre pour l’intégration des soins de santé mentale dans les systèmes de santé
3- Initiatives de prise en charge de l’usage de drogues : Expérience du Centre neuropsychiatrique de Kamenge-Prise en charge en milieu hospitalier. L’exposant a présenté la situation de la santé mentale au Burundi, les causes des maladies mentales dans le pays et la prise en charge au niveau du centre psychiatrique de référence. Il a également partagé les grands défis du CNPK pour une meilleure prise en charge des patients.
4-La problématique de prise en charge de l’usage de drogue : Expérience de l’association Aluma-Sensibilisation en milieu de jeunes. Cet exposé s’est articulé autour de la situation générale de la consommation des drogues au Burundi à travers quelques expériences pilotes engagées sur le terrain pour lutter contre le phénomène.

Au regard de leur pertinence, ces présentations ont suscité d’enrichissants débats qui ont abouti à des suggestions pour que la question de la santé mentale soit mieux adressée au Burundi. Parmi ces suggestions, on peut noter, entre autres, la nécessité d’un financement accru sur la santé mentale ; la mise en œuvre d’une législation pour lutter contre l’usage des drogues par les adolescents et les jeunes ; l’intégration de la santé mentale dans les hôpitaux publics ; la réduction du coût du traitement par la mise en place d’une assurance-maladie, l’accessibilité des médicaments psychotropes ; la mise à disposition d’un personnel qualifié et en nombre suffisant dans les centres de prise en charge et la mise en place d'un programme intégré de santé mentale afin de permettre une bonne cohésion au niveau des interventions. 

Par ailleurs, la célébration de la journée mondiale de la santé mentale au Burundi s’est poursuivie le 25 octobre, toujours sous les hospices de la Première Dame, SE Angéline NDAYISHIMIYE, dans la ville de Ngozi avec les manifestations officielles. A travers des allocutions, les différents intervenants, à savoir le Gouverneur de la province de Ngozi, le Représentant de l’OMS, le Ministre de la santé et la Première Dame, ont réaffirmé leur ferme engagement à œuvrer pour la bonne santé mentale des Burundais et Burundaises. 

Aux élèves venus nombreux assister aux manifestations, SE Mme la Première Dame a conseillé de s’adonner sérieusement aux études, en évitant des pratiques qui les exposeraient aux maladies mentales, comme la consommation d’alcool et des drogues. Elle les a également exhortés à la pratique du sport qui contribue à une bonne santé mentale. 
La question de la vulnérabilité des jeunes et adolescents face aux maladies mentales reste préoccupante pour l’OMS. Selon Dr. Xavier CRESPIN, 116 millions de personnes vivent avec des troubles mentaux en Afrique. Les taux de suicide sont très préoccupants, comme celui de consommation et d’abus d’alcool chez les adolescents d’à peine 13 ans. Par conséquent, il a plaidé pour le renforcement de la règlementation afin d’empêcher les jeunes de se procurer facilement de l’alcool et des drogues, ainsi que toute autre chose qui entraverait leur éducation et leur vie.

Dr. Xavier CRESPIN a exhorté tout un chacun à œuvrer pour lutter contre les facteurs entravant la santé mentale et à rendre accessibles les soins de santé mentale à tous afin que personne ne soit laissée de côté.

Cette cérémonie officielle du 25 octobre à Ngozi s’est achevée par la remise de chèques aux lauréats de productions audiovisuelles sur la santé mentale au Burundi.