Le Congo face à l’onchocercose : un exemple de résilience et de collaboration
Brazzaville – Au Congo, l’onchocercose est un problème majeur de santé publique. Près de deux millions de personnes sont à risque d’avoir la maladie dans 19 districts sanitaires sur les 52 que compte le pays, soit environ 30 % de la population totale. Autrefois limitée aux communautés rurales vivant à proximité des rivières et des terres agricoles, elle est désormais également présente en milieu urbain, notamment dans les localités situées près des cours d’eau.
Pour y faire face, le gouvernement a mis en place, à travers le Programme national de lutte contre l’onchocercose (PNLO), une stratégie d’élimination dont les axes principaux sont entre autres les moyens de prévention qui comprennent la sensibilisation des communautés sur les mesures de protection individuelle, ainsi que le traitement de masse des populations dans les districts endémiques. L’Onchocercose est transmise par les piqûres de mouches noires infectées qui causent des démangeaisons intenses, des lésions cutanées et oculaires voire une cécité irréversible dans les cas graves. C’est la raison pour laquelle la maladie est surnommée « cécité des rivières ».
Au cours des 20 dernières années, 18 campagnes de distribution de masse de médicaments, contre l’onchocercose ont été organisées dans les districts à risque, et les résultats sont encourageants. L’adhésion des communautés aux traitements de masse s’est largement améliorée, avec une participation bien plus forte aujourd’hui qu’il y a 20 ans. Cette évolution reflète non seulement une meilleure sensibilisation, mais aussi une confiance croissante dans la lutte contre l’onchocercose et ses bénéfices attendus pour la santé des populations.
Avec l’appui des partenaires tels que l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), l’organisation non gouvernemental britannique Sightsavers, les firmes pharmaceutiques, des activités intenses ont été menées récemment, notamment la mobilisation communautaire, la formation des professionnels de santé et des relais communautaires, et la distribution de médicaments afin d’interrompre la transmission. La dernière campagne, organisée entre octobre et décembre 2024 qui visaient à toucher plus de 842 000 personnes a pu atteindre près de 700 000 personnes, soit 80 % de la cible.
Le partenariat gagnant est salué par les partenaires, et particulièrement par le Directeur du PNLO, Dr Marlhand Hemilembolo. « Nous continuerons de travailler ensemble pour lutter contre cette maladie. La collaboration entre les communautés locales, les professionnels de santé et nos partenaires internationaux est essentielle pour atteindre notre objectif d'élimination de la maladie. »
Dans les communautés où la filariose lymphatique est également présente, le traitement préventif de masse a été associé à l’administration de l’albendazole qui est un déparasitant. Pour la dernière campagne de traitement de masse, 2 261 000 comprimés de Mectizan ont été mis à disposition accompagnés de 629 200 comprimés d’albendazole. Bien que des efforts aient été déployés pour contribuer à une réduction du taux d'infection, il est important de noter qu’une seule campagne ne suffira pas à éliminer la transmission.
La prévention joue un rôle central dans la lutte contre l'onchocercose, en complément des traitements administrés. Youlou Annie, âgée de 50 ans et mère de cinq enfants, fait partie des bénéficiaires de ce traitement. « J’ai pris ce médicament non seulement pour me protéger, mais aussi pour éviter que mes enfants ne souffrent un jour de cette maladie. La prévention est la clé », se réjouit-elle.
Véronique, une agricultrice de 53 ans vivant à Brazzaville le long du fleuve Congo, a également bénéficié de ces campagnes avec sa famille. Chaque année, elle attend avec impatience la distribution des médicaments à domicile pour éviter que la maladie progresse. « Tout avait commencé par des piqûres d’insectes que je pensais être des moustiques. C’est arrivé alors que je travaillais dans mes jardins et ça me grattait énormément. Ma peau a même changé de couleur », se souvient Véronique. Cinq ans après les premiers symptômes, elle a été diagnostiquée avec l’onchocercose et prise en charge dans le centre de santé de la localité. Bien qu’elle ait reçu un traitement, elle continue à prendre des médicaments pour éviter l’évolution de la maladie vers des complications chroniques, telles que des lésions oculaires ou une cécité irréversible.
Pour atteindre les bonnes cibles comme Véronique lors des campagnes, plus de 6000 distributeurs communautaires, formés par le PNLO avec ses partenaires techniques et financiers, été chargés de sensibiliser les populations sur le bien-fondé du traitement de masse avant de procéder au porte-à-porte pour administrer le traitement. Jean-Marie Saboutou, distributeur communautaire dans le district sanitaire de Mfilou à Brazzaville, en fait partie. « La formation reçue sur les techniques de sensibilisation, la gestion des stocks de médicaments et les bonnes pratiques de distribution nous a considérablement mieux préparés pour accomplir notre mission », indique-t-il. « J’effectue ce travail depuis 24 ans et j’ai vu surtout que grâce à la sensibilisation, les populations comprennent l'importance de se protéger et acceptent le traitement sans hésitation. Ce n’était pas le cas il y a quelques années. »
Grâce aux efforts concertés et à l'engagement des communautés locales, le Congo poursuit sa lutte contre l'onchocercose et les efforts pour améliorer la qualité de vie de ses populations dans les zones touchées. Cependant, malgré ces efforts, il est essentiel de souligner que la lutte contre cette maladie reste un défi, notamment en raison des taux d'infection observés dans certains districts, qui dépassent le seuil recommandé par l'OMS et de nouveaux foyers de transmission qui émergent dans les zones urbaines proches des rivières. Cette situation met en évidence la nécessité d’actions continues et renforcées pour lutter contre cette maladie. L’onchocercose reste un défi majeur de santé publique, nécessitant une mobilisation accrue autour de la prévention, du traitement et de la collaboration pour protéger les populations les plus exposées.
« Notre objectif va au-delà d’une simple réduction du seuil de la transmission de l’infection. Cette maladie ne doit plus constituer une menace pour la santé publique », déclare le Dr Vincent Sodjinou, représentant par intérim de l’OMS au Congo. « Nous voulons protéger les communautés de cette maladie, traiter ceux qui en souffrent et transformer la vie des personnes les plus vulnérables en améliorant leur santé et leurs moyens de subsistance. »
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