Sénégal : faire des structures de santé des lieux sûrs pour les patients
Dakar – Au Sénégal, comme dans la plupart des pays de la Région africaine, les infections en milieu hospitalier constituent un défi majeur. Dénommées infections nosocomiales, elles font partie des événements indésirables les plus fréquemment observés dans le cadre de la prestation de soins. Selon les estimations de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), sur 100 patients hospitalisés en soins intensifs, 7 contracteront au moins une infection nosocomiale pendant leur séjour à l’hôpital dans les pays à revenu élevé et 15 dans les pays à revenu faible ou intermédiaire.
Les résultats de l’enquête mondiale sur les programmes nationaux de lutte anti-infectieuse, menée par l’OMS en 2021-2022, indiquent que 42,5 % des pays dans la Région africaine ne disposaient pas de programme dédié à la prévention et au contrôle des infections (PCI) ou en disposaient mais celui-ci n’était pas mis en œuvre. Ce qui expliquait les taux élevés d'infection par la COVID-19 chez les travailleurs de la santé, ajoute le rapport d’enquête.
Pour améliorer la situation, le Bureau régional de l'OMS pour l'Afrique appuie 11 pays de la Région (Côte d'Ivoire, Guinée, Lesotho, Madagascar, Mali, Namibie, Rwanda, Sénégal, Soudan du sud, Tchad, Togo) afin de renforcer la mise en œuvre des composantes essentielles de la PCI selon une approche progressive adaptée aux besoins locaux.
Au Sénégal, d’après la dernière enquête de prévalence des infections associées aux soins menée dans le pays en 2018, 6 % des infections recensées étaient nosocomiales. « Avant, nous ne savions pas que notre travail était important pour un hôpital. Nous pensions que la santé des malades ne nous concernait pas et dépendait uniquement des médecins », indique Fatou, technicienne de surface à l'Hôpital Régional de Saint-Louis, avec une once de regret dans la voix. « Nous mettions nos vies en danger ainsi que celles des patients, sans le savoir. »
Les audits conduits par l’État sénégalais et l’OMS ont montré des insuffisances dans le respect des mesures de salubrité dans les structures de santé, telles que l’hygiène des mains par les médecins et le nettoyage approprié des infrastructures par le personnel de soutien. Ces insuffisances ont été notées dans tous les services, y compris ceux où les patients sont les plus vulnérables, comme celui de la gériatrie, l’unité de prise en charge des personnes âgées.
Face à ce problème, plusieurs initiatives ont été mises en place pour renforcer les capacités du pays en matière de prévention et de contrôle des infections (PCI). L’approche soutenue par l’OMS consiste à renforcer la formation de base et avancée à la PCI et à élaborer un plan d'action national pour chaque pays.
« L’OMS accorde une grande importance à la protection des patients au sein des structures de santé. Les infections en milieu hospitalier compliquent la prise en charge des patients et mettent à risque les professionnels de la santé. Elles sont un frein au succès des actions visant à renforcer nos systèmes de santé déjà fragilisés par d’autres facteurs », souligne le Dr Jean Marie Vianny Yameogo, Représentant de l’OMS au Sénégal.
Avec l’appui du Multi Partner Trust Fund, la Direction de la qualité, de la sécurité et de l’hygiène hospitalières (DQSHH) du Sénégal a formé en 2021 et 2022, 80 % des prestataires de soins de santé et plus de 430 techniciens de surface à travers le pays. Ces formations ont porté sur les stratégies de prévention et de contrôle des infections, la gestion des déchets biomédicaux et le nettoyage biologique, en se basant sur l’approche intégrée « une seule santé », qui prend en compte les interactions entre la santé humaine, animale et environnementale.
« Nous avons ainsi pu sensibiliser les médecins sur le respect strict des standards pour leur propre survie et celle des patients », explique Dre Ndella Konaté, Directrice de la DQSHH. « Les ateliers organisés ont eu un effet significatif sur la consolidation des stratégies de prévention et de contrôle des infections dans nos structures de santé. »
Un peu plus d’un an après les formations, des évaluations conduites à l’aide de l’outil de l’OMS pour les programmes de lutte anti-infectieuse (IPCAT) ont montré que 63 % des structures, dont le personnel a été formé, ont amélioré leurs pratiques de prévention contre les infections, passant d’un niveau bas à un niveau élevé.
Au-delà de ces résultats quantitatifs, ces renforcements de capacité ont induit un changement de mentalité au niveau des techniciens de surface et des médecins. « Ces formations ont été essentielles pour améliorer nos compétences en matière de prévention et contrôle des infections et garantir des soins de haute qualité. Négliger la PCI entraîne des infections, et si elles sont résistantes aux antimicrobiens, cela peut être fatal », déclare la Dre Maimouna Sarr, médecin au service de gériatrie de l’hôpital du Centre Hospitalier de Fann.
La prévention et le contrôle des infections sont importants dans un service de gériatrie, où les patients sont souvent plus vulnérables en raison de leur âge et des comorbidités. Ces initiatives de formation ont permis d'améliorer considérablement la sécurité des patients. « Avant, je n'étais pas conscient des risques d'infection à l'hôpital, mais maintenant je vois que les infirmières et les médecins et même les femmes de ménage prennent des précautions supplémentaires pour nous protéger. Cela me rassure beaucoup de savoir que ma santé est prise au sérieux et que tout est fait pour éviter les infections », confie Mamadou Fall, 75 ans, patient en gériatrie à l'Hôpital Fann.
Les techniciens de surface, sont désormais conscients de l’impact de leur travail sur la santé des patients. « Nous avons compris que dans une structure de santé, nous pouvons être à l'origine d'infection nosocomiale et que nous devons nous impliquer en tant que garants de la sécurité sanitaire des patients », souligne Fatou. « Maintenant, nous connaissons notre rôle dans la santé publique. Nous nous sentons protégés, valorisés et déterminés à contribuer à la bonne guérison des patients », conclut Fatou.
Chargée de communication
Bureau régional pour l'Afrique
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Chargée de Communication
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