Lomé – En janvier 2024, Yao*, un planteur âgé de 67 ans résidant à Agou à une centaine de kilomètres au nord-ouest de Lomé, a connu des malaises inhabituels qui l’ont conduit à l’hôpital. Ces malaises comprenaient entre autres des douleurs à la poitrine et une fatigue intense inexpliquée qui a duré deux semaines. Après avoir effectué les tests, il a été diagnostiqué de la tuberculose. « J’étais surpris et très désolé de savoir que j’étais atteint de la maladie. J’avais trop souffert et je voulais guérir par tous les moyens », se rappelle-t-il. 

Au Togo, 30 personnes sur 100 000 étaient atteintes de la maladie en 2023, selon le rapport mondial de l’OMS publié en 2024 sur la tuberculose. Le pays a mis en œuvre plusieurs initiatives pour améliorer la lutte contre la tuberculose, comme l’explique le Professeur Abdou Gafarou Gbadamassi, Coordonnateur du Programme national de lutte contre la tuberculose (PNLT) au Togo : « Plusieurs interventions combinées nous permettent de progresser dans la lutte contre cette maladie en nous focalisant notamment sur la recherche des cas, le dépistage précoce, et le traitement effectif des patients. » 

Au cœur du dépistage précoce figure l’optimisation des machines GeneXpert qui permettent de tester rapidement les échantillons de crachats des malades pour confirmer la maladie. Cette approche, recommandée par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) comme moyen de diagnostic de première ligne, a contribué significativement au renforcement du dépistage des cas au Togo. Jusqu’en 2020, le pays ne disposait que de 15 machines GeneXpert sur 14 sites, pour arriver à 52 sites en 2024.

Le Professeur Gbadamassi se réjouit de ce développement qui, selon lui, a permis de faire de grands pas : « Grâce à cette amélioration notable du parc des GeneXpert, le dépistage précoce des cas a été amélioré, passant de 72 heures à 24 heures dans tout le pays. Ceci contribue à faire progresser notre pays vers l’éradication de la tuberculose. D’autres axes de la lutte contre la tuberculose concernent l’implication des communautés pour garantir le traitement centré sur le patient, la gratuité de la prise en charge de toutes les formes de tuberculose, ainsi que la prise en charge nutritionnelle des patients les plus vulnérables. »

Grâce à la disponibilité d’une machine au Centre hospitalier préfectoral (CHP) d’Agou où il a été reçu, Yao a pu être placé sous traitement rapidement. Après de premières semaines de traitement pénibles en raison de la lourdeur du traitement, il a senti sa situation s’améliorer. « Les produits me rendaient très faible au départ. Après les deux premiers mois, j’ai fait un premier contrôle et les résultats étaient négatifs. J’ai effectué d’autres contrôles au cinquième mois et au sixième mois, où on m’a déclaré guéri de la tuberculose. J’en ai tellement souffert au départ que j’étais convaincu que la maladie me serait fatale ! » 

En juin 2022, une stratégie dite « FAST » axée sur la recherche active dans quatre sites des districts d’Agoè Nyivé et Golfe à Lomé, a permis de franchir la barre de 3000 cas dépistés de tuberculose à partir de 2022 (atteignant 3041 cas en 2022, 3065 cas en 2023 et 3129 en 2024), comparé à 2312 en 2020 et 2418 en 2021. 

De 2020 à fin 2023, un projet d’investigation contribuant à l’élimination de la tuberculose en Afrique a par ailleurs étudié les patients contagieux dans 35 centres de diagnostic et de traitement (CDT), et a permis de dépister tôt les patients souffrant de la tuberculose et fournir un traitement de chimiothérapie préventive aux personnes indemnes, dont les enfants de moins de 15 ans et les personnes vivant avec le VIH. Depuis 2024, cette intervention a été étendue aux 55 autres CDT grâce à l’appui du Fonds Mondial.

Avec sept ans d’expérience en tant que personnel de santé soignant des patients atteints de tuberculose, Yorouma Djobo, Point focal du CDT au CHP d’Agou, prodigue des conseils essentiels aux malades. Il assure le dépistage, la mise sous traitement et le suivi du traitement des patients atteints de tuberculose dans le district sanitaire d’Agou. Yorouma reçoit en moyenne 3 patients atteints de tuberculose chaque mois et insiste sur le rôle de la famille. « Notre rôle est de nous assurer que toutes les personnes dépistées reçoivent le traitement et recouvrent la santé. Une fois que la famille a compris les méfaits de la maladie, elle devient notre soutien principal et prennent en charge le traitement des patients, en s’appropriant les conseils donnés aux patients dans le but de les aider. »

En 2022 Yorouma, comme 95 autres points focaux ont été formés sur toutes les thématiques de la tuberculose dont la tuberculose pédiatrique, l’éducation thérapeutique des patients, les directives de prise en charge et le traitement préventif. La même année, 60 techniciens de laboratoire ont été formés sur le diagnostic par le GeneXpert sur les selles et en 2024, 65 techniciens de laboratoire ont été formés sur le diagnostic de la tuberculose par la bacilloscopie.

L’OMS apporte son soutien par la mise à disposition d’experts, l’appui technique pour l’élaboration et la validation de documents et orientations, et fournit un appui financier à des évènements ou activités phares. L’Organisation a également initié en fin 2023 l’approche dite BBNT (initiales pour Bénin, Burkina Faso, Niger et Togo) comme cadre d’échanges d’expériences dans la lutte contre le VIH, les hépatites virales, la tuberculose et le paludisme appuyant des visites de terrain pour le partage de bonnes pratiques dans ces pays.

Pour la Dre Laconi Kaaga, Responsable du Programme de lutte contre la tuberculose au bureau de l’OMS au Togo, le soutien de l’OMS a pour buts majeurs, que « chaque personne à risque ait accès à une prévention, à un diagnostic et à un traitement rapide et efficace de la tuberculose. » 

Ayant recouvré la santé et repris son travail de planteur, Yao encourage la population à se faire consulter en cas de toux persistante et à respecter les conseils du personnel traitant jusqu’à la guérison totale. Il a un message particulier à l’endroit des familles des patients : « Ma famille a été un élément indispensable à ma guérison. Sans leur appui, la tuberculose m’aurait emporté ! Si un membre de votre famille est atteint de cette maladie, restez proche, aidez la personne pour qu’elle reste motivée et qu’elle ne perde jamais espoir. »