La baisse des dons de sang aggrave les menaces qui pèsent sur la santé maternelle en Afrique
Brazzaville - Seulement la moitié du sang nécessaire à la transfusion chaque année dans la région africaine est actuellement collectée, exposant de nombreuses personnes à des pénuries potentiellement mortelles. La pandémie de COVID-19 a encore aggravé cette pénurie, les dons ayant chuté de 17% l'année dernière.
L’une des raisons pour lesquelles la transfusion sanguine est cruciale est qu’elle sert à sauver la vie de femmes qui souffrent d'hémorragies graves pendant la grossesse, l'accouchement ou après l'accouchement. Une telle hémorragie peut être fatale en deux heures si elle n'est pas traitée. « Sans cette transfusion, j'aurais pu mourir », déclare Guemaime*, victime d'une hémorragie lors de son accouchement à l'hôpital Mère-Enfant Blanche Gomez de Brazzaville, la capitale de la République du Congo.
Sur les 196 000 femmes qui décèdent chaque année en Afrique subsaharienne de complications liées à la grossesse, un tiers meurt d'une hémorragie. Les femmes enceintes ont besoin de transfusions sanguines pour traiter l'anémie ou les hémorragies dues à des pathologies de certaines grossesses, explique le Dr Guy Armand Yoka, gynécologue et chef du service d'obstétrique de l'hôpital Mère-Enfant Blanche Gomez.
La moitié des décès maternels dus à des hémorragies graves dans le monde se produisent en Afrique subsaharienne et environ 65 % de ces décès surviennent après la naissance. Le taux de mortalité pour 100 000 naissances vivantes dans la région est de 542, contre 10 pour 100 000 naissances vivantes en Europe. Jusqu'à 75 % de ces décès maternels sont directement dus à cinq complications : l'hémorragie, la septicémie, l'éclampsie, l'obstruction du travail et les complications de l'avortement. La plupart de ces complications nécessitent une disponibilité rapide de sang pour sauver la vie de la mère et de l'enfant.
Si le besoin en sang est universel, l'accès à ceux qui en ont besoin ne l'est pas. Les pénuries de sang sont particulièrement graves dans les pays en développement. Les sévères perturbations des principaux services de santé, dues à la pandémie ainsi que les restrictions de mouvement et autres mesures visant à enrayer la propagation du virus dans de nombreux pays africains, ont non seulement réduit les dons de sang, mais aussi la demande, qui a chuté de 13 % en raison de la suspension des opérations chirurgicales de routine dans certains pays et de la diminution du nombre de personnes cherchant à se faire soigner dans les établissements de santé.
Au Centre national de transfusion sanguine de la République du Congo, par exemple, les dons ont chuté de 10 % en 2020 par rapport à l'année précédente, où 85 000 poches de sang avaient été collectées, indique le Dr Oscar Mokono, directeur du centre, attribuant cette baisse à la pandémie. « Le sang nous concerne tous. Nous ne pouvons pas surmonter les pénuries sans les dons. »
En 2021, le thème de la Journée mondiale du don de sang – célébrée chaque année le 14 juin – est « Donnez votre sang pour faire battre le cœur du monde », afin de souligner la contribution essentielle des donneurs de sang qui continuent à sauver des vies et à améliorer la santé des autres.
Pour améliorer l'approvisionnement en sang sécurisé en Afrique, l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) collabore avec des organisations telles que la Coalition du sang pour l'Afrique, l'Organisation des Premières Dames d'Afrique pour le développement, ainsi que le secteur privé afin d'améliorer l'accès à des réserves de sang de qualité. En partenariat avec Facebook, l'OMS a également mis en place une fonction de dons de sang régionaux, qui met en relation les personnes avec les banques de sang situées à proximité. Cet outil est désormais opérationnel dans 12 pays et plus de 3,8 millions d'utilisateurs de Facebook se sont inscrits pour être informés des possibilités de don de sang.
L'insuffisance des financements et l'absence de systèmes efficaces pour collecter, analyser et assurer un approvisionnement sûr et régulier en sang compromettent la disponibilité et la fourniture de ce produit vital dans de nombreux pays d'Afrique, où environ 5 millions de poches de sang – la moitié de la quantité requise – sont collectées chaque année.
L'OMS soutient également les pays par le biais de directives et de l'élaboration de politiques, notamment les politiques nationales de transfusion sanguine, les stratégies de dépistage et d'analyse ainsi que de préparation et de contrôle de la qualité des produits sanguins.
*Son nom complet n’est pas donné pour protéger son identité.