La santé des populations en péril après trois mois de violence au Soudan
Déclaration conjointe du Dr Ahmed Al-Mandhari, Directeur régional de l’OMS pour la Méditerranée orientale, et de la Dre Matshidiso Moeti, Directrice régionale de l’OMS pour l’Afrique
Les combats continuent au Soudan depuis le mois d'avril et le nombre de victimes ne cesse d’augmenter. La population est obligée de fuir leur maison et leur pays et beaucoup se retrouvent piégés avec un accès limité aux services essentiels, y compris les soins de santé.
Après trois mois de conflit, le pays est confronté à une crise humanitaire sans précédent qui s’est étendue à six pays situés dans deux Régions de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). En effet, 24 millions de personnes ont besoin d’une aide humanitaire, dont 2,6 millions de personnes sont déplacées à l'intérieur du pays, et 757 000 personnes supplémentaires forcées de fuir au-delà des frontières pour des raisons de sécurité. Et ces chiffres augmentent chaque jour.
La situation au Soudan a atteint un niveau très critique : plus de 67 % des hôpitaux du pays sont actuellement non opérationnels et le nombre d’attaques visant les services de santé est en constante augmentation. Entre le 15 avril et le 24 juillet 2023, l’OMS a confirmé 51 attaques contre les services de santé, faisant 10 morts et 24 blessés. Alors que cette crise s’aggrave, il est regrettable de constater que des combattants continuent d’attaquer les établissements de santé et les travailleurs de santé, privant ainsi des civils innocents de services vitaux, au moment où ceux-ci sont le plus vulnérables.
Lorsque la guerre sévit, ce sont les femmes et les enfants qui en paient toujours le plus lourd tribut. Nous sommes consternés par les informations faisant état des cas de violences basées sur le genre dont des violences sexuelles à l'encontre de femmes et de jeunes filles, de même que par la situation des personnes déplacées, qui sont particulièrement vulnérables. Aujourd’hui, plus de quatre millions de femmes et de filles sont exposées au risque de violence sexuelle et sexiste. Il est nécessaire de les protéger à tout prix.
Les flambées de maladies telles que le paludisme, la rougeole, la dengue, tout comme les cas de diarrhée aqueuse aiguë, qui étaient bien maîtrisées avant le conflit en cours, s’intensifient en raison de la perturbation des services de base de santé publique, y compris la surveillance des maladies, le fonctionnement des laboratoires de santé publique et des équipes d’intervention rapide. Avec l’arrivée de la saison des pluies au Soudan, une forte augmentation du nombre de cas risque de faire davantage de victimes si des mesures urgentes ne sont pas prises pour enrayer leur propagation.
Même avant le déclenchement de ce conflit, le Soudan était confronté à d’énormes besoins humanitaires et sanitaires dus au contexte marqué par des affrontements, l’insécurité alimentaire, le changement climatique et un système de santé fragile.
Dans le contexte actuel, en l’absence de perspectives immédiates de paix, l’accès à l’aide humanitaire et son acheminement, y compris aux équipements sanitaires d’urgence sont largement compromis.
Pour les centaines de milliers de personnes qui ont trouvé refuge au-delà des frontières, les conditions de vie demeurent précaires. L’accès aux services de santé est très variable, car la plupart des zones frontalières qui accueillent ces personnes sont isolées, avec des systèmes de santé limités ou faibles, principalement en raison du nombre insuffisant de travailleurs de la santé. Plusieurs pays hôtes, notamment la République centrafricaine, l’Éthiopie, le Soudan du Sud et le Tchad, accueillent déjà un nombre important de populations déplacées par de précédents conflits. Ces populations se trouvent dans des conditions de vie difficiles, sans accès aux services essentiels. Les besoins sont immenses et ne cessent de croître.
L’OMS déploie tous les efforts nécessaires pour garantir les services de santé essentiels. Nos équipes sont sur le terrain depuis le début des violences armées et travaillent sans relâche pour que les services de santé restent accessibles. En plus, nous collaborons activement avec les partenaires à l’intérieur du pays et au-delà des frontières pour garantir que les équipements médicaux indispensables dont les populations ont urgemment besoin, leur soient livrés en temps utile. Nous œuvrons également au renforcement du système de surveillance pour détecter les épidémies et permettre une riposte rapide.
Malgré les graves défis qui font obstacle à notre action, nous sommes aux côtés du peuple soudanais et nous nous engageons à être présents et à fournir un appui pour sauver des vies. Nous lançons un appel pour la protection des civils, des travailleurs humanitaires, des établissements de santé, des travailleurs de la santé et des patients, dont la sécurité doit être respectée par toutes les parties en conflit.
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