Les experts intensifient les efforts contre le diabète dans la Région africaine
Brazzaville – En juin 2021, au plus fort de la pandémie de COVID-19, Emmanuella Selasi Hormenoo, une étudiante ghanéenne de 18 ans, se trouvait au seuil de la mort. « Au départ, les médecins envisageaient la possibilité que je sois atteinte de la COVID-19, mais les résultats des tests se sont constamment révélés négatifs. Pendant que je recevais l’une des transfusions sanguines auxquelles j’ai dû me soumettre, j’ai fait un arrêt cardiaque et je suis retombé dans un autre coma ».
Après trois mois particulièrement difficiles, marqués par des séjours répétés à l’hôpital et une lutte constante contre des complications mortelles, dont une paralysie des membres inférieurs qui a duré plusieurs mois, Emmanuella avait finalement été diagnostiquée du diabète de type 1. Il s’agit de la forme la plus grave de la maladie, qui touche environ 10 % des personnes atteintes de diabète. Désormais, Emmanuella doit s’administrer régulièrement de l’insuline pour maintenir sa glycémie à un niveau normal et retrouver de l’énergie.
Le diabète est une affection chronique à vie qui se caractérise par l’incapacité de l’organisme à produire suffisamment d’insuline ou à utiliser de manière efficace l’insuline produite, ce qui entraîne une augmentation des niveaux de sucre dans le sang. En l’absence de traitement, le diabète peut entraîner des complications allant des maladies cardiaques et des accidents vasculaires cérébraux à des lésions nerveuses, en passant par des lésions rénales, une amputation des membres inférieurs ou encore des maladies oculaires susceptibles de provoquer la cécité.
Selon les estimations, 24 millions de personnes vivent avec le diabète dans la Région africaine. Un chiffre qui devrait plus que doubler pour s’établir à 55 millions au cours des deux prochaines décennies, marquant ainsi la plus forte augmentation prévue à l’échelle mondiale. Les données indiquent que seulement la moitié des individus ayant reçu un diagnostic de diabète bénéficient d’un traitement approprié.
« Le défi du diabète en Afrique revêt une triple dimension », explique la Dre Maïmouna Ndour Mbaye, responsable du Centre national Marc Sankalé de lutte contre le diabète au Sénégal. « En premier lieu, nous avons le plus grand nombre de nouveaux cas prévus sur le plan mondial. Deuxièmement, nous enregistrons les effectifs les plus élevés en ce qui concerne le nombre de personnes vivant avec cette maladie sans en avoir conscience, et qui sont exposées à un risque élevé de complications potentiellement mortelles. Troisièmement, nous affichons le taux d’investissement le plus bas au monde dans les soins du diabète, ne représentant que 1 % des dépenses de santé de la Région. De plus, nos systèmes de santé sont principalement conçus pour les maladies aiguës et infectieuses, tandis que les maladies chroniques ne reçoivent pas suffisamment d’attention en termes d’infrastructures, d’équipements et de ressources ».
Pour remédier à cette situation, le Bureau régional de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) pour l’Afrique travaille actuellement sur le schéma directeur concernant le diabète en Afrique, dans le cadre du Pacte mondial de l’OMS contre le diabète, une initiative mondiale de lutte contre le diabète lancée en avril 2021, à l’occasion du centenaire de la découverte de l’insuline.
L’objectif principal du Pacte mondial de l’OMS contre le diabète est de réduire le risque de diabète et de garantir que les individus diagnostiqués aient accès à un traitement et à des soins équitables, complets, de qualité et abordables. Le pacte consiste principalement en un ensemble complet d’informations et de lignes directrices émises par l’OMS concernant la prévention et la gestion du diabète. Il est axé sur quatre domaines d’action clés : accroître l’engagement politique et les ressources, renforcer les systèmes de santé, améliorer l’accès à des médicaments et à des technologies abordables et autonomiser les personnes atteintes de diabète.
Le Schéma directeur constitue une stratégie de mise en œuvre du Pacte mondial de l’OMS contre le diabète dans la Région africaine. Ce Schéma directeur met en lumière les besoins et les particularités de la Région, tout en renforçant de manière concrète la prévention et la prise en charge du diabète. Les experts de la Région ont travaillé en étroite collaboration avec les techniciens et les médecins du Bureau régional de l’Afrique en vue de concevoir et de finaliser le Schéma directeur sur le diabète.
En commençant par une analyse de la situation, incluant une description détaillée des programmes de lutte contre le diabète en Afrique, les experts ont mis l’accent sur les priorités et les engagements régionaux en matière de prévention du diabète et sur son intégration dans les programmes de lutte contre les maladies non transmissibles dans la Région.
Selon les experts, de nombreux systèmes de santé font encore face aux répercussions de la pandémie de COVID-19, qui a mis à rude épreuve les capacités, parfois au-delà des limites, et a réduit considérablement, voire interrompu, les services de dépistage et de traitement des affections chroniques telles que le diabète.
En vue de renforcer les efforts de lutte contre le diabète dans les pays à forte prévalence de la Région africaine, il est impératif de combler un certain nombre de lacunes. Ces lacunes comprennent notamment la persistance de mythes et de fausses idées concernant le diabète au sein du grand public, la vulnérabilité des systèmes de soins de santé de première ligne, ainsi que le manque de compétences et de formation des professionnels de la santé. Parmi les autres insuffisances, on peut évoquer la rareté et les coûts élevés d’une alimentation saine, le manque d’efforts de sensibilisation en faveur de la santé, dans un contexte de leadership politique déficient et de difficultés à obtenir des données de qualité.
Emmanuella a personnellement dû faire face à bon nombre de ces défis. « L’un des défis les plus importants lorsqu’on vit avec cette maladie réside dans les coûts associés aux médicaments et à l’entretien personnel, englobant notamment l’alimentation et d’autres médicaments nécessaires en cas de complications », dit-elle.
Au cours de sa dernière année d’université, Emmanuella a mis son expérience au service de la sensibilisation en collaborant avec Diabetes Youth Care, une organisation non gouvernementale basée au Ghana, qui en plus de sensibiliser et d’œuvrer pour combattre la stigmatisation prodigue des conseils aux jeunes vivant avec cette maladie. Reconnue comme une championne du diabète par ses pairs et ses mentors, Emmanuella a parcouru un long chemin sur la voie de l’amélioration de la santé et du bien-être.