Les infirmières communautaires du Ghana fournissent des soins de santé aux enfants sur fond de COVID-19
Accra - Un sac à dos contenant des médicaments et du matériel simples mais essentiels, voilà tout ce dont Antoinette Nuselie Segla, infirmière principale en santé communautaire, a besoin pour entamer une mission de santé à Fadama, une communauté peuplée du nord de la capitale du Ghana, Accra. Segla et son équipe de trois autres infirmières s'occupent de plus de 50 soignants et de leurs enfants pendant les journées de consultation dans la cour de l'imam en chef de Fadama. Et ce, jusqu'au début de la pandémie de COVID-19. La peur de contracter le virus a empêché les gens de recourir aux services de santé.
"Quand ils (la communauté) ont entendu parler de COVID-19, ils ont refusé de venir et nous avons aussi eu un peu peur au début parce que nous n'avions pas d'équipement de protection individuelle approprié pour travailler ; pas de seaux pour se laver les mains et moins de chaises pour assurer une bonne distanciation physique", explique Segla.
La pandémie a également affecté les services de vaccination. En avril, le Programme élargi de vaccination (PEV) du Ghana a suspendu la campagne de vaccination préventive de masse contre la fièvre jaune. Les activités de santé communautaire, qui constituent environ 45 % de la stratégie de vaccination du pays, ont également été interrompues.
Lorsqu'un confinement partiel de trois semaines de la capitale Accra a été levé, Segla et son équipe ont décidé de reprendre leurs activités. En organisant des consultations plus petites mais fréquentes, en appelant les parents dont les enfants n'ont pas été vaccinés et en programmant des visites à domicile si nécessaire, l'équipe a fait en sorte que les enfants de leur communauté soient vaccinés.
"Notre objectif est de fournir des soins préventifs, donc s'ils ne viennent pas à cause de la COVID-19, nous devons aller les voir. C'est la nature de notre travail, et nous nous sommes engagés à le faire", explique Segla. En moyenne, l'équipe visite environ 20 ménages par jour et s'occupe d'environ cinq enfants par famille.
Au Ghana, les vaccinations ont contribué à la réduction des taux de mortalité néonatale, infantile et des enfants de moins de cinq ans. La rougeole, par exemple, a chuté de façon spectaculaire, passant de plus de 23 000 cas en 2000 à seulement 34 en 2018, tandis que le tétanos néonatal a été éliminé dans le pays depuis 2011. Le Ghana n'a également signalé aucun cas de polio sauvage depuis 2008 grâce aux campagnes de vaccination de routine et de vaccination contre la polio.
"Faire vacciner mon enfant est le mieux que je puisse faire pour le protéger et c'est pourquoi j'accueille les infirmières chez moi", déclare Aboagyewaa Osei, mère d'un bébé de trois ans. "Elles viennent avec des masques et des gants donc il n'y a pas à s'inquiéter".
Pour Osei, permettre aux infirmières de faire leur travail malgré la COVID-19 est sa façon de leur manifester sa gratitude devant le risque qu'elles prennent pour fournir des services essentiels aux enfants, dit-elle.
Le pays a connu jusqu'à présent une baisse de 10 % de la couverture vaccinale, explique Dr Kwame Amponsa-Achiano, responsable du PEV au Ghana Health Service.
Au cours du premier trimestre 2020, environ 21 000 enfants ont manqué la deuxième dose du vaccin contre la rougeole et la rubéole et plus de 50 000 ont manqué la vaccination contre la fièvre jaune. Si la tendance se poursuit en raison de la pandémie de COVID-19, le Ghana comptera environ 200 000 enfants non vaccinés d'ici décembre 2020, selon les projections de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) au Ghana.
L'OMS au Ghana soutient le Programme élargi de vaccination du pays par des recommandations sur la manière de conduire les services de vaccination en toute sécurité pendant la pandémie de COVID-19.
Ces recommandations portent sur la santé génésique, maternelle, néonatale, infantile et des adolescents et sont axées sur les services essentiels qui doivent être fournis dans toutes les structures de santé. Elles décrivent les mesures que les travailleurs de la santé doivent prendre pour empêcher la propagation de la pandémie.
Le responsable technique chargé des vaccinations au bureau de l'OMS au Ghana, Fred Osei Sarpong, indique que la directive résume également les équipements de protection de base qui doivent être fournis pour toutes les séances de vaccination.
"Un soutien direct a également été apporté aux régions pour permettre la pérennité des services de vaccination dans le cadre de la COVID-19", ajoute-t-il.
Selon Fred, un contrôle constant permet d'identifier les structures, districts et régions qui ont été durement touchés par la pandémie afin que les mesures appropriées soient prises. Ceci, dit-il, est très important car une accumulation d'enfants non vaccinés pourrait entraîner des épidémies de maladies évitables par la vaccination. "L'impact des épidémies de maladies évitables par la vaccination pourrait même être plus dévastateur que celui de la COVID-19, en particulier pour les enfants qui auraient autrement été vaccinés".
"Nous n'avons pas interrompu la vaccination de routine à cause de la COVID-19", explique Dr Amponsa-Achiano. "Nous le faisons en respectant les mesures de prévention de la COVID-19 et la directive de l'OMS, et la situation s'améliore progressivement".
Il explique que d'autres régions telles que Bono, Bono Est, Nord-Est et Nord ont toutes pu vacciner davantage d'enfants à travers des actions de proximité et d'autres stratégies telles que celles utilisées par Segla et son équipe.
"Nous voulons reprendre nos campagnes d'ici août, car plus nous attendrons, plus la situation empirera", déclare Dr Amponsa-Achiano.