Renforcer la réponse sanitaire pour les populations touchées par la sécheresse au Kenya

Marsabit, Kenya – Dans le Comté de Marsabit situé au nord du Kenya, les populations fuient la pire sécheresse depuis 40 ans et l’insécurité alimentaire qu’elle entraîne. C’est l’un des huit comtés qui composent cette région aride et semi-aride du Kenya.

On estime que 3,5 millions de personnes, soit 24 % de la population, étaient confrontées à une insécurité alimentaire aiguë dans cette région entre juillet et septembre 2022. Selon la Kenya National Disaster Management Authority, ce chiffre devrait encore augmenter de 26 % d’ici la fin du mois de décembre 2022, pour passer à 4,4 millions de personnes.

Les conditions de vie et la santé des populations se détériorent alors qu’elles fuient leur environnement habituel pour se rendre dans des zones où elles peuvent trouver des moyens de subsistance pour leurs familles et le bétail.

Pour faire face à cette situation, l’unité de services de santé du Comté de Marsabit, avec l’appui de l’Organisation mondiale de la Santé, a dépêché des équipes de proximité dans les villages pour soigner la malnutrition chez les enfants, fournir les services de santé essentiels permettant de sauver des vies et recueillir des informations capitales sur la santé.

Le Comté de Marsabit se situe dans la région aride du nord du Kenya, à la frontière avec l’Éthiopie. Il est vulnérable aux phénomènes climatiques extrêmes et aux catastrophes naturelles qui forcent ses habitants à fuir, à la recherche de nourriture, d’eau et de pâturages pour le bétail.

L’insécurité alimentaire aiguë due à la sécheresse persistante dans ce Comté est exacerbée par des années de conflit intercommunautaire, les vols de bétail, les répercussions de la pandémie de COVID-19 et la hausse des prix des denrées alimentaires.
« C’est difficile. Nous mangeons à peine, car nous n’avons pas les moyens de nous procurer suffisamment de nourriture », confie Lerren Lekale, un éleveur de chameaux du Comté.

Lerren fait partie des 1,2 million d’habitants des huit comtés de la région aride et semi-aride du Kenya qui sont classés en catégorie 3 – le niveau d’urgence le plus élevé de l’Organisation mondiale de la Santé.

« La sécheresse détruit nos vies. J’ai une femme et trois enfants que je vois désormais rarement parce que je déplace les chameaux pour pouvoir les garder en vie », ajoute-t-il. « J’avais neuf vaches et cinq d’entre elles sont déjà mortes. C’est maintenant au tour des chameaux de mourir. S’ils meurent, alors nous mourrons aussi. »
L’accès à l’eau est tout aussi difficile. Étant donné que les sources naturelles s’assèchent, il est impératif de rationner l’eau entre les humains et le bétail.

« La situation devient incontrôlable. Je n’ai jamais vécu une période aussi difficile. Cette source était pour nous tous un point d’approvisionnement régulier en eau, mais maintenant nous avons un gros problème. Elle produit trop peu d’eau », se plaint Elama Bayo, un membre de la communauté qui gère l’accès au point d’eau de Hulahula, dans le village de Korr.

Certaines personnes rentrent chez elles sans une goutte d'eau après avoir marché sur plus de 10 km pour atteindre la source et sont obligées de recommencer tout le processus le lendemain.
Le manque de nourriture et d’eau constitue un risque majeur pour la santé des populations de la région sur lesquelles pèse une forte menace d’épidémies de maladies évitables par la vaccination, de maladies non transmissibles, de maladies chroniques évitables, de malnutrition et de famine.

Environ 942 000 enfants de moins de 5 ans vivant dans les régions arides et semi-arides souffrent de malnutrition aiguë et 26 % d’entre eux de malnutrition sévère.

Par ailleurs, près de 134 000 femmes enceintes ou allaitantes devraient souffrir de malnutrition aiguë d’ici fin 2022.
Alors que la sécheresse prend de l’ampleur, l’hôpital de référence du Comté de Marsabit et d'autres centres de santé ont engagé une action visant à dépister et soigner les personnes souffrant de malnutrition et de maladies transmissibles.
Les équipes de sensibilisation parcourent parfois de longues distances pour atteindre les populations qui se déplacent.


« Les enfants malnutris présentent également d’autres complications de santé et parfois, nous nous rendons aussi compte qu’ils n’ont pas reçu les vaccins essentiels », indique Guyatu Galdesa, infirmière à l’hôpital central du comté de Marsabit.

Les équipes de proximité identifient ces enfants, leur administrent des vaccins de rattrapage, fournissent des compléments alimentaires et soignent ceux qui sont malades. Certains sont hospitalisés lorsque leur cas est grave.
L'OMS soutient ces opérations de secours d'urgence. Elle a fourni pour 7 millions de dollars des médicaments et équipements essentiels aux pays de la Grande Corne de l'Afrique touchés par la sécheresse, dont le Kenya.

L'Organisation a également déployé des experts pour aider le gouvernement kényan à mener des interventions sanitaires essentielles. La collecte de données clés sur la santé permet d'orienter les interventions là où elles sont le plus nécessaires.

Le docteur Adam Haji, médecin de l'OMS qui soutient les équipes de proximité des comtés, s’inquiète de possibles décès, notamment de personnes âgées, si les conditions ne s'améliorent pas rapidement.
« La malnutrition et la maladie interagissent l’une sur l’autre. Les personnes souffrant de malnutrition tombent malades plus facilement et les personnes malades deviennent plus facilement malnutries », souligne le Dr Egmond Evers, gestionnaire d’incident de l’OMS pour l’insécurité alimentaire et la sécheresse dans la Grande Corne de l’Afrique. « Cette combinaison est très dangereuse. Nous devons intensifier la lutte contre les maladies à potentiel épidémique et la riposte, fournir des services de santé essentiels, y compris des vaccins et le traitement contre la malnutrition sévère. Il n’est pas trop tard pour pouvoir sauver encore beaucoup de vies », déclare-t-il.
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