Mbandaka/Bikoro – Du 10 au 20 août 2024, une campagne de vaccination contre la maladie à virus Ebola (MVE) s’est déroulée dans la province de l’Équateur, notamment dans les zones de santé de Mbandaka et de Bikoro. Cette campagne préventive a ciblé plus de 10 000 personnes, en particulier les proches des anciens guéris des précédentes épidémies de MVE. Organisée par le Ministère de la Santé Publique, Hygiène et Prévoyance Sociale, avec le généreux soutien de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et des Centres de contrôle et de prévention des maladies (CDC) des États-Unis, cette initiative fait partie d’une stratégie coordonnée visant à prévenir la transmission post-épidémique et à éviter de nouvelles épidémies d’Ebola.

La République démocratique du Congo (RDC) est régulièrement confrontée à des épidémies de virus Ebola. La dernière, la 15ème de l’histoire du pays, déclarée en juillet 2022 à Beni, a été contenue en moins de deux mois au Nord-Kivu grâce à une riposte rapide, où la vaccination a joué un rôle crucial.

Julie, 39 ans, mère de cinq enfants, a perdu son mari en 2018, emporté par la maladie à virus Ebola. Elle-même avait contracté le virus à l'époque, mais a survécu grâce aux soins reçus dans un centre de traitement à Mbandaka, la capitale provinciale. Déterminée à ne plus voir aucun membre de sa famille souffrir de cette maladie, Julie a convaincu tous ses enfants devenus majeurs, ainsi que ses proches, de se faire vacciner contre Ebola.

L'Équateur faisait partie des provinces les plus affectées par Ebola qui demeure une menace de santé publique dans le pays. Entre 2018 et 2022, la province a été frappée par trois épidémies d'Ebola (9ème, 11ème et 14ème épidémies), touchant 13 de ses 18 zones de santé. Près de 190 cas confirmés dont 93 décès ont été signalés lors de ces épidémies.

L’entourage de Julie faisait partie d'une vaste cohorte de plus de 10 000 personnes, proches d'anciens patients guéris, réparties dans une dizaine de zones de santé de l'Équateur, notamment Bolomba, Bikoro, Iboko, Ingende, Lilanga Bobangi, Lolanga Mampoko, Lotumbe, Mbandaka, Monieka et Wangata. Ces zones de santé sont ciblées pour la vaccination à travers une quarantaine de sites, visant à protéger les populations des futures épidémies d'Ebola.

Scène d’une équipe d'hygiénistes désinfectant un centre de santé dans un quartier de Mbandaka, lors de la dernière épidémie d’Ebola en 2022. Crédit, OMS/Eugene Kabambi.

Fidèle Lofete, 75 ans et père de cinq enfants est le plus âgé des "vainqueurs" de l'épidémie d'Ebola qui a frappé la province de l’Équateur en 2020. Pour lui, mobiliser ses proches était un devoir. "J’ai convaincu plus de 290 personnes de mon entourage qui ont accepté de se faire vacciner", déclare-t-il. Assis devant sa machine à coudre, son outil principal de travail, usé par les années, il observe les membres de sa communauté s’enregistrer pour la vaccination, dans un élan remarquable de solidarité.

Fidèle Lofete, guéri de la maladie à virus Ebola à Bikoro et devenu un symbole de résilience pour sa communauté, se tient fièrement devant son atelier de couture. Crédit: OMS/Junior Diatezua

Pour cette campagne de vaccination, l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) a joué un rôle essentiel dans l’acheminement des doses de vaccins et a coordonné leur déploiement dans les zones de santé ciblées. De plus, 45 équipes de terrain comprenant des superviseurs, des agents vaccinateurs, des gestionnaires de données et de déchets ont été mobilisés et formés en collaboration avec le Programme Élargi de Vaccination et la Division provinciale de la Santé de l’Equateur. L’OMS a également appuyé la coordination, ainsi que la communication sur les risques et l’engagement communautaire.

La mobilisation sociale a fait partie des succès de cette campagne, indique le Dr Richard Lesthu, chef du sous-bureau de l'OMS à Mbandaka. "Nous avons recensé plus de 95 survivants des récentes flambées d'Ebola dans l'Équateur. Pour ces personnes qui sont en contact avec leurs familles et leurs communautés, ce vaccin sûr et efficace contre Ebola, a permis de les protéger contre toute réémergence de la maladie."
 

Les équipes de l'OMS, en collaboration avec celles de la Division provinciale de la Santé (DPS) et du Programme élargi de vaccination (PEV), participent aux activités de la vaccination contre Ebola à Bikoro, zone de santé située à 120 km de Mbandaka. Crédit: OMS/Junior Diatezua.

Au cœur de ces crises sanitaires dévastatrices, Dre Nicole Kumbolani Afuwa, cheffe de la Division provinciale de la Santé (DPS) de l'Équateur, a observé que la psychose qui a prévalu au sein des communautés, se demandant combien de temps cela durerait, a cédé la place à une lueur d'espoir qui brille désormais dans les yeux de ces populations souvent exposées à cette zoonose mortelle. En effet, les mesures de santé publique, la protection individuelle et collective, l'engagement communautaire et la vaccination soutenue par l'OMS et d'autres partenaires ont porté du fruit.

"J’ai été profondément émue par la disponibilité et le courage de toutes ces personnes venant de différents villages, parfois à pied, jusqu’aux sites de vaccination. Je suis reconnaissante à l'OMS et au CDC de nous avoir permis de bénéficier de ces vaccins pour une protection durable de nos communautés." Pour cette campagne de 10 jours, le vaccin Ervebo a été utilisé pour son efficacité. Une seule dose offre une protection de plus de 97 %. Au total, 10 144 personnes, soit 99,5 %, ont bénéficié de ce vaccin. Par rapport à la cible identifiée de 14 927 personnes, au moins 68 % des proches des guéris ont été vaccinés.

Une vaccinatrice mesure la température d’une candidate à la vaccination lors de la campagne de vaccination des proches des guéris d’Ebola dans l'Equateur. Crédit: OMS/Junior Diatezua.

"Nos familles et nos proches ont été sensibilisés aux bienfaits de cette vaccination préventive. Je suis convaincue que cela sauvera des vies et nous évitera de revivre le cauchemar de l’épidémie de 2018", déclare Julie, entourée de ses enfants.

 À Mbandaka, une jeune femme proche des personnes guéries d’Ebola reçoit sa dose de vaccin lors du premier passage de la campagne de vaccination dans l’Équateur. Crédit: OMS/ Junior Diatezua.

Pour Fidèle, il reste "crucial de sensibiliser nos communautés à la mortalité du virus Ebola". "Ayant moi-même survécu à cette maladie, je comprends le danger de ce virus dévastateur. Je ne souhaite à aucun de mes proches de revivre cela", conclut-il.
 

Julie, guérie d’Ebola il y a quelques années, partage des moments de joie avec sa famille et ses proches après la clôture de la campagne de vaccination le 20 août 2024 à Mbandaka. Crédit: OMS/Junior Diatezua.