Tchad : intégrer les approches communautaires et renforcer les systèmes de surveillance pour mieux répondre aux crises sanitaires
N’Djamena – Fort de 12 ans d'expérience en épidémiologie et en gestion des urgences de santé publique, le Dr Guy Ohirweoluhya Mulumeoderwa, épidémiologiste, a été déployé en septembre 2024 pour appuyer la surveillance des maladies à l’issue des inondations qu’a connues le Tchad en juillet et aussi soutenir les efforts en termes de prévention et de contrôle des infections à l’est du pays.
« Lorsque cette mission au Tchad m'a été proposée, J'y ai vu un défi à relever, une occasion d'apporter mon expertise en épidémiologie dans un contexte humanitaire exigeant et éprouvant », explique le Dr Guy. « Je n'ai pas hésité un instant. J’ai tout de suite répondu "oui". »
Le Dr Guy a été déployé au Tchad grâce au Réseau mondial pour l’alerte et la riposte aux épidémies (GOARN), mis en place l’Organisation mondiale de la Santé (OMS). Ce réseau a pour mission d’intervenir lors d'événements sanitaires publics aigus en mobilisant du personnel et des ressources dans les pays affectés.
Entre septembre 2024 et mars 2025, cet épidémiologiste de terrain a contribué à la mise en place de mécanismes de détection précoce des cas de diphtérie, dengue, hépatite E, et varicelle, au suivi des contacts de diphtérie, et varicelle et à l’évaluation des besoins sanitaires des populations déplacées. En six mois de déploiement, le Dr Guy a formé plus de 45 agents de santé communautaire et près de 75 prestataires de soins locaux à l’amélioration de la collecte, de la transmission et de l’analyse des données sanitaires. Il a aussi renforcé les capacités du Centre des opérations d'urgence en santé publique (COUSP) dans l’amélioration des systèmes de surveillance des maladies à potentiel épidémique. « C’était une expérience enrichissante sur le terrain. En contribuant à l’amélioration de la prise de décisions sur la base de données probantes et vérifiées, j’ai le sentiment d’apporter un soulagement aux personnes fuyant le conflit au Soudan et aux sinistrés des inondations à N’Djaména », souligne le Dr Guy, dont les efforts ont contribué à la réduction des cas de choléra et de rougeole grâce à des campagnes de vaccination et à la promotion de l’hygiène.
« Je me suis senti fier et utile aux communautés. Nous avons enregistré moins de malades de rougeole grâce à une meilleure surveillance », affirme-t-il. Pour cette maladie, les chiffres sont passés de 300 cas en février à 6 cas en novembre 2024, soit un taux de réduction de 98 %. En ce qui concerne le choléra, contrairement aux inondations de 2022 qui avaient entraîné une épidémie, en 2024, aucun cas n’a été détecté.
Le travail du Dr Guy a permis de faciliter l’analyse des tendances épidémiologiques et lacunes en matière de santé publique, permettant d’orienter les interventions, notamment en matière de vaccination, de prise en charge des cas de malnutrition et de prévention des infections.
Pour la Dre Adneli Alliance Toglengar, médecin urgentiste formée et déployée sur le site des sinistrés à Farcha Milezi au nord de N’Djaména, l’appui du Dr Guy leur a apporté de l’efficacité. « Il nous a accompagnés dans l'exploitation des fiches de consultation, la distribution des kits WASH, la sensibilisation contre les maladies d'origine hydrique, l'orientation par rapport au suivi des malades et la surveillance des maladies à déclaration obligatoire », souligne la Dre Toglengar. « Aujourd'hui, nous nous en félicitons car tous les sinistrés ont pu regagner leurs domiciles. »
En fin de mission, le Dr Guy tire une grande satisfaction de son passage au Tchad. « J’ai une fois de plus vécu l’importance de l’engagement communautaire, de la coordination entre les acteurs humanitaires et de l’adaptation des interventions aux réalités locales », indique-t-il. « J’ai vu de près les souffrances des populations déplacées, mais aussi leur résilience et leur espoir. »
Le Dr Guy entend capitaliser les bonnes pratiques et les leçons apprises pour ses futures missions. « Je vais m’appliquer à mettre en application ce que j’ai appris au Tchad, notamment l’intégration des approches communautaires et le renforcement des systèmes de surveillance pour mieux répondre aux futures crises sanitaires », a-t-il conclu.