Au Burkina Faso, améliorer le dépistage et la prévention du cancer du col de l’utérus
Au Burkina Faso, le cancer du col de l’utérus (CCU) est le deuxième cancer le plus fréquent chez les femmes. En 2020, 1132 cas de cancer du col de l’utérus ont été enregistrés avec 839 décès soit 74,1% des cas diagnostiqués, selon l’Observatoire mondial du cancer Globocan (IARC). Ceci est dû principalement au manque d’information, de prévention, de détection précoce, d’accès aux traitements.
Le 17 novembre 2020, la stratégie mondiale d’élimination du cancer du col de l’utérus a été lancée par de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) avec pour objectif de réduire l’incidence de cette maladie (à 4/100 000 femmes) afin qu’elle ne soit plus un problème de santé publique d’ici 2030. C’est dans ce cadre qu’a été lancé au Burkina Faso le programme « SUCCESS (« renforcer l’élimination du cancer du col de l’utérus l’élimination du cancer du col de l’utérus par une stratégie de prévention secondaire). Explications avec le Dr Amadou Sagnon, médecin gynécologue obstétricien à la Direction de la prévention et du contrôle des maladies non transmissible au Ministère de la santé et chargé du programme national de lutte contre le cancer.
Que fait le Burkina Faso pour lutter contre le cancer du col de l’utérus, en ligne avec la stratégie mondiale de l’OMS ?
Le gouvernement du Burkina Faso a adhéré à la stratégie qui est en adéquation avec sa vision de la lutte contre le cancer. Toute une série d’actions de lutte contre le cancer ont été mises en place. Par exemple, il existe depuis 2017, un programme national de lutte contre le cancer au sein de la Direction de la prévention et du contrôle des maladies non transmissibles. Nous avons aussi élaboré des directives nationales de prévention du cancer du col de l’utérus avec l’appui de l’ONG Médecins du monde et décidé de la gratuité du dépistage et du traitement des lésions précancéreuses du col de l’utérus depuis 2015 ce qui montre l’engagement du gouvernement dans la prévention secondaire correspondant au 2ème 90% de la stratégie mondiale.
En ce qui concerne le 1er objectif de la stratégie à savoir 90% de jeunes filles vaccinées Par ailleurs, il est envisagé d’intégrer le vaccin HPV à la vaccination de routine à partir janvier 2022. Enfin, l’ONG Médecins du Monde met actuellement en œuvre un projet de prévention secondaire du cancer du col de l’utérus dans des sites pilotes de 6 régions du Burkina.
Nous nous concentrons sur l’amélioration de l’offre de soins de prévention secondaires et tertiaires. Notamment, la construction et l’ouverture du premier centre de radiothérapie en décembre 2020 à Ouagadougou et de l’ouverture prochaine d’un deuxième de radiothérapie centre à Bobo-Dioulasso. Enfin, nous accompagnons les représentants de la société civile qui sont fortement impliqués dans les actions de lutte contre cette maladie.
Nous sommes aussi en train de redéfinir la stratégie nationale d’élimination du cancer du col de l’utérus et de créer un centre de formation et de prise en charge des cancers gynécologiques.
Le projet SUCCESS (Scale Up Cervical Cancer Elimination with Secondary prevention Strategy) a été inspiré par la stratégie mondiale de l’OMS et vise à dépister 40 000 femmes au Burkina Faso. Quel bilan tirez-vous un an après son lancement ?
Ce programme a beaucoup d’impacts positifs qui contribuent à la lutte contre cette maladie. On peut ainsi citer la mise en place du groupe technique de travail pour l’élimination du cancer du col de l’utérus (GTT-ECCU) en avril 2021. De plus, beaucoup de formations ont lieu, parmi lesquelles celles de trois formateurs nationaux sur le test HPV et la thermo-coagulation, de treize formateurs régionaux en CECAP (Cervical cancer prevention), ainsi que des prestataires de soins et des techniciens de laboratoire.
Suivant la stratégie « Screen and treat » (dépister et traiter) de l’OMS, des équipements logistiques spécifiques (pistolets de thermocoagulation, équipement pour la résection à l’anse diathermique, etc.) ont été commandés et ont déjà été réceptionnés.
Nous avons aussi élaboré un plan de sensibilisation et de création de la demande de service de dépistage et de prise en charge des lésions précancéreuses du col de l’utérus, comme des boîtes à images, des affiches, des flyers, des dépliants, ainsi que des textes pour des spots radio et télé. Pour cela, 65 acteurs (conseillers psycho-sociaux et accoucheuses auxiliaires) ont été formés.
Quels défis existent en matière de dépistage et de prise en charge du cancer du col de l’utérus ?
Le défi majeur est de rendre accessibles les services offerts pour accélérer l’élimination du cancer du col de l’utérus conformément à la stratégie mondiale. Les activités de sensibilisation et de génération de la demande contribuent à atteindre nos objectifs. En revanche, certains besoins ne sont pas encore couverts. Par exemple, il y a lieu de renforcer les soins de santé primaires en intégrant les activités de prévention du cancer du col de l’utérus. C’est pour cela que nous prévoyons d’acquérir 15 unités mobiles de dépistage et de prise en charge des lésions précancéreuses du col de l’utérus. Ces bus médicalisés et équipés seront basés dans chaque région pour faciliter l’accès à ces services à un plus grand nombre de femmes.
Comment le dépistage améliore-t-il la prévention et la prise en charge du cancer du col de l’utérus au Burkina Faso ?
L’avantage est de dépister les lésions précancéreuses qui peuvent être définitivement détruites et de protéger les bénéficiaires contre un cancer avéré du col de l’utérus. De surcroît, le coût du dépistage et de la prise en charge des lésions précancéreuses est nettement moindre que celui du diagnostic et de la prise en charge des cancers, en termes de logistique à déployer et aussi de frais supplémentaires.