Survivre au VIH et redonner un sens à sa vie

Survivre au VIH et redonner un sens à sa vie
© Kadijah Diallo, WHO AFRO
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Survivre au VIH et redonner un sens à sa vie

Brazzaville - En sept mois, Irène Mahoungou était passée de 65 kg à 19 kg. Elle ne pouvait plus marcher seule, ni s’alimenter. « J’étais réellement à la porte de la mort. Quelques temps après, je suis rentrée dans un coma qui a duré cinq jours et dès que je me suis réveillée, j’ai demandé à être testée pour le VIH. C’était la seule piste qui avait été ignorée jusque-là. Elle s’est avérée être la bonne piste » se souvient Irène.

C’était il y a 24 ans. Irène avait au départ subi une opération superficielle qui s’était bien passée. Elle aurait dû se rétablir rapidement, mais au contraire, elle est tombée de plus en plus malade et son état se dégradait de jour en jour. « C’est comme si ma peau se détachait peu à peu, et mes cheveux aussi se détachaient de ma tête », explique-t-elle.

Lorsqu’elle a été déclarée séropositive, Irène a tout de suite accepté la réalité de sa situation et a commencé son combat contre le sida. « Je savais que mon état d’esprit serait déterminant pour que je m’en sorte alors je me suis prise en main. Je voulais vivre, continuer à m’occuper de mes trois enfants, et même voir mes petits-enfants naître », se rappelle-t-elle.

Un traitement vital

La prochaine phase de sa vie a été caractérisée par une stricte discipline quant à la prise de ses médicaments. Pendant une année, elle devait prendre jusqu’à 21 comprimés matin, midi et soir, à cause des infections opportunistes. C’était sa routine jusqu’au jour où elle est sortie du tunnel et a regagné 50 kg en une année.  « A présent, je prends juste ma dose matinale d’ARV. Un seul comprimé et je suis bien ! », se réjouit Irène qui vit heureuse depuis 15 ans avec un homme qui l’a choisie bien qu’étant lui-même séronégatif.  

Au Congo, le traitement pour les personnes séropositives est gratuit depuis 14 ans. Alors qu’il n’avait pas encore été offert gratuitement au niveau national, les médicaments étaient très coûteux. Irène en a beaucoup souffert. Au départ, sa famille l’aidait pour obtenir les médicaments mais il fut un moment où l’argent a manqué et elle est restée trois mois sans traitement. « A cause de cela, j’avais perdu la vue et je garde des séquelles jusqu’aujourd’hui. La gratuité du traitement a été d’un grand soulagement ! » se souvient-telle.

La nécessaire réintégration sociale

Aujourd’hui âgée de 55 ans, Irène a huit petits-enfants et considère sa vie comme un miracle. L’appui de sa famille a été déterminant et contrairement à de nombreuses personnes atteintes du VIH, Irène n’a pas été rejetée par ses proches. « Ils se sont très bien occupés de moi, selon leurs capacités », se remémore-t-elle. « Beaucoup de personnes souffrent du rejet des leurs. J’en connais qui sont allés jusqu’à se donner la mort à cause de l’abandon de leur famille », affirme-t-elle.

Toutefois, le chemin n’a pas été exempt d’embûches. Le plus dur pour elle a été la stigmatisation que sa famille et elle ont connue. « Un jour, mon fils âgé de neuf ans revenait de l’école et il a été moqué par des voisines du quartier. Une d’entre elles disait : ‘’Voyez-vous ce petit là, sa maman est sidéenne ! C’est la maladie de la honte ! Elle a des plaies partout.’’ Mon petit est rentré très malheureux ce jour-là et m’a demandé si j’allais mourir et le quitter. C’est ainsi que mes enfants ont découvert que j’ai le VIH. »

Par bonheur, tous ses enfants se sont avérés séronégatifs et ils ont peu à peu appris à vivre avec la situation, en restant optimistes et en se conformant aux instructions données par leur mère quant à l’utilisation de ses affaires personnelles, particulièrement les objets tranchants.

Vivre aussi pour les autres  

Forte de son expérience, Irène a pris l’initiative il y a 18 ans de créer une association dénommée « Bomoi », qui signifie « la vie » en lingala. « Nous sommes 64 membres et notre mission est d’aider d’autres personnes vivant avec le VIH, pour redonner aussi un sens à leur vie », explique-t-elle. « J’ai soutenu beaucoup de personnes ces dernières années. Nos activités ciblent entre autres les femmes enceintes, dans le cadre de la Prévention de la Transmission Mère-Enfant, mais aussi les jeunes. »

Pour accompagner la réinsertion professionnelle de ces jeunes, Irène supervise depuis l’année dernière une équipe de 20 personnes dont 8 hommes et 12 femmes démunis qu’elle initie à la vannerie. Les produits finaux sont des paniers, des chaises et des accessoires divers qui sont vendus sur commande.

Toujours dans l’esprit de se mettre au service de sa communauté, Irène a rejoint un groupe de médiateurs communautaires et participe aux campagnes de dépistage gratuit organisées par le gouvernement. « Ce qui motive les gens à connaître leur sérologie, ce sont les témoignages de ceux qui ont été malades. Lors de ces activités, mon histoire sert de déclic. Beaucoup de jeunes acceptent de se faire dépister à la suite de mon témoignage. »

Les campagnes de sensibilisation sont aussi l’occasion de briser les mythes autour du VIH. « Les gens disent au sujet des personnes positives au VIH qu’elles partent à l’hôpital mais ne reviennent jamais. C’est comme si avoir le sida est une condamnation à mort. Ma présence lors de ces séances est la meilleure réplique à ces fausses idées. » Et son rôle ne s’arrête pas là : « Nous arrivons aussi à convaincre les gens de ne pas abandonner les membres de leur famille aux mains des marchands d’illusions qui prétendent avoir un remède pour soigner le VIH. Les gens doivent savoir qu’il faut aller à l’hôpital », insiste-t-elle.

C’est ainsi qu’elle a redonné un sens à sa vie. « Lorsque j’étais alitée entre la vie et la mort, je m’étais promise qu’une fois guérie, je dédierai aussi ma vie aux autres, pour qu’ils s’en sortent aussi. Je suis heureuse car j’arrive à faire cela », conclut-elle avec un grand sourire.

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Kadijah Diallo

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Bureau Régional de l'OMS pour l'Afrique 
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Mariam Ouedraogo

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