Au Rwanda, les agents de santé communautaires à la pointe de la lutte contre le paludisme

Kigali – Ces sept dernières années, le Rwanda a considérablement réduit le fardeau du paludisme : le taux d’infection a chuté de 409 cas pour 1000 personnes en 2016 à seulement 76 cas pour 1000 personnes en 2022. De plus, les décès dus au paludisme ont diminué de plus de 89 % au cours de la même période.

Cette réussite a été rendue possible grâce aux efforts du gouvernement, en partenariat avec l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) et d’autres partenaires, consacrés à l’expansion et à la décentralisation des initiatives de lutte contre le paludisme au niveau des communautés. Pour cela, un large éventail de mesures a été mis en place, de l’éducation du public à la prévention, en passant par le diagnostic et le traitement.

Les agents de santé communautaires font partie intégrante des efforts du pays pour lutter contre la maladie. En partenariat avec l’OMS, le pays a formé 30 000 agents de santé communautaires pour qu’ils soient en mesure d’offrir un traitement complet à domicile, ce qui a sauvé la vie à des centaines de personnes. En 2022, pas moins de 55 % de l’ensemble des cas enregistrés ont été diagnostiqués et traités par des agents de santé communautaires, contre 15 % en 2016.

Esther Urimubenshi, une agricultrice de 50 ans vivant dans le district de Bugesera, dans la Province de l’Est du Rwanda, appréhendait toujours la saison des pluies, pendant laquelle la menace du paludisme pesait constamment sur sa famille.

En 2016, Esther a été malade du paludisme trois fois en seulement deux mois, malgré les médicaments. « À cause de la fièvre, des frissons et de la faiblesse dus à la maladie, j’étais sans force et incapable de m’occuper de ma famille et de mes champs. C’était une période difficile », dit-elle.
La situation d’Esther a fini par changer. Theoneste Nezehose, un agent de santé communautaire, aide Esther et sa communauté à lutter contre le paludisme depuis 12 ans.

Theoneste a sensibilisé Esther et sa famille à l’importance des bonnes pratiques pour éviter la transmission du paludisme et à d’autres mesures de prévention telles que la suppression des sites de reproduction des moustiques et l’utilisation de moustiquaires. Esther n’a pas eu de paludisme depuis plus de deux ans.
« Le paludisme nous hantait constamment, mais Theoneste a fait renaître l’espoir », dit-elle.
En plus de disséminer des informations importantes sur la prévention du paludisme, les agents de santé communautaires comme Theoneste fournissent des diagnostics et des traitements précoces, distribuent des moustiquaires imprégnées d’insecticides et font des pulvérisations à effet rémanent dans les domiciles pour aider à prévenir les transmissions. Ils contrôlent et signalent aussi tous les cas à l’établissement de santé le plus proche.

« J’ai reçu un appui sous forme de fournitures et de formation au centre de santé Mayange, à sept kilomètres d’ici. J’envoie des rapports hebdomadaires et ils m’aident avec l’orientation des cas », explique-t-il. « Être capable de faire une différence dans la vie des personnes comme Esther et des autres membres de la communauté est un privilège que je chéris chaque jour. »
« Les agents de santé communautaires sont les héros méconnus de la lutte contre le paludisme dans le pays », souligne le Dr Emmanuel Hakizimana, chef par intérim de la division chargée du paludisme au Centre biomédical du Rwanda (RBC), l’entité opérationnelle du Ministère de la santé. « Grâce à eux, nous avons été capables de placer la prévention, la détection et le traitement du paludisme au cœur de la communauté, ce qui a aussi réduit la pression sur les établissements de santé. »
Cette approche de la gestion communautaire des cas a été mise en œuvre en tandem avec d’autres interventions. Parmi celles-ci figurent la distribution, entre 2016 et 2022, de plus de six millions de moustiquaires, suivant la logique voulant qu’une moustiquaire servent à au moins deux membres d’une famille. Ce ratio est considéré comme étant suffisant pour atteindre une couverture universelle de la population. De plus, les pulvérisations à effet rémanent dans les domiciles ont été étendues de trois à 12 districts qui enregistrent habituellement le plus lourd fardeau de cas de paludisme.

Le pays a également amélioré l’accès aux services de santé pour tous à travers son plan d’assurance santé à base communautaire qui aide à s’assurer que les gens reçoivent un traitement rapide et gratuit contre le paludisme.
L'OMS a été un partenaire clé dans la lutte du pays contre le paludisme. L’Organisation a soutenu les formations des agents de santé communautaires, le développement de lignes directrices techniques et la mise en œuvre d’un plan stratégique national pour 2020-2024, avec l’objectif de réduire la mortalité due au paludisme d’au moins 50 % par rapport aux niveaux de 2019.

« Les agents de santé communautaires sont la colonne vertébrale des programmes de santé communautaires et ils contribuent immensément à gérer les maladies comme le paludisme », souligne le Dr Jules Mugabo Semahore, en charge du paludisme et des maladies tropicales négligées à l’OMS Rwanda. « Ils jouent un rôle essentiel pour atteindre les communautés éloignées et défavorisées avec des interventions qui sauvent des vies. L’OMS continue de s’associer au Ministère de la santé pour donner des moyens d’agir à cette pièce maîtresse de la lutte contre le paludisme. »
Le diagnostic et le traitement du paludisme ont été décentralisés pour améliorer le traitement rapide des cas et cibler tous les groupes d’âge, explique le Dr Hakizimana.

Il ajoute que dans les années à venir, le pays prévoit de s’attaquer aux défis rencontrés par le programme de lutte contre le paludisme du Rwanda. Ceci inclut la gestion efficace des formes de transmission de la maladie qui peuvent persister après avoir atteint la couverture universelle avec les moustiquaires et la pulvérisation à effet rémanent, notamment lorsque les moustiques piquent des personnes hors des habitations ou le bétail. Le pays va renforcer la recherche opérationnelle et numériser l’enregistrement des cas de paludisme dans les villages et les foyers afin de répondre au manque de données à ce niveau.

Le programme prévoit de renforcer les capacités des agents de santé communautaires comme Theoneste. Celui-ci est fier de sa contribution à la lutte. « Ce qui me motive à continuer est de voir moi-même la différence que mon travail fait dans la communauté », dit-il. « C’est un sentiment incroyable. »
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